« 421 est convoqué chez le chef de camp. »
Pâle, terriblement amaigri, le prisonnier s'avance, pieds nus dans la neige, vers le bureau de l'officier. Dans la pièce, il fait chaud, clair ; une bonne odeur de gâteaux flotte dans l'air.
« Ils sont excellents, les gâteaux envoyés par ta femme » s'écrie le chef, la bouche pleine.
Le prisonnier a le cœur serré en pensant aux privations que sa femme a endurées pour se procurer le beurre nécessaire à la confection de ces gâteaux, et c'est ce gros chef qui en profite ! Alors il est saisi d'une terrible colère, il va étrangler l'homme qui le nargue, ses muscles se contractent...
Mais une parole lui traverse l'esprit, c'est un verset de la Bible qui parle de Jésus Christ, son Seigneur : « Quand on l'outrageait, il ne rendait pas l'outrage, quand il souffrait il ne menaçait pas, mais se remettait à celui qui juge justement. » 1 Pierre 2. 23 421 se détend un peu et dit d'une voix tremblante : « Monsieur le chef de camp, vous êtes un pauvre homme. Mais parce que je connais Jésus, le Fils de Dieu, comme mon Sauveur, ces gâteaux, je vous les donne. » C'est au tour du chef de se mettre en colère : « Tu parles d'un Sauveur et tu es prisonnier, tu fais confiance à Dieu et tu manques de tout. Moi, je ne crois en rien et j'ai tout ce que je veux, même les gâteaux de ta femme que tu vas me regarder manger jusqu'au dernier ! »
De retour dans son baraquement sombre et glacé, étendu sur sa paillasse, le prisonnier pense à sa femme et ses enfants : Où sont-ils ? Que font-ils ? Des larmes coulent sur ses joues maigres... Mais paisiblement, il remet les siens à Celui qui a dit : « Je ne te laisserai pas et je ne t'abandonnerai pas ». Hébreux 13. 5
Quelques années plus tard, 421 a été libéré, il a retrouvé sa vie paisible avec sa famille. Un soir, il raconte à sa femme étonnée l'épisode des gâteaux et conclut : « Je vais me venger ! On doit pouvoir retrouver ce chef de camp. »
Quelques jours après en effet, 421 tient à la main la fameuse adresse et sa femme porte par une ficelle rouge un paquet enveloppé de papier blanc : c'est l'arme de la vengeance. Ils ont pris le train et marché dans la ville jusqu'à un certain immeuble. En sortant de l'ascenseur, ils ont appuyé sur la sonnette et maintenant la porte s'entrouvre. Un regard inquiet dévisage les deux visiteurs. Oui, c'est bien l'ancien chef de camp ! 421 s'avance :
— Bonjour, Monsieur, me reconnaissez-vous ?
— Non...
— 421, ça ne vous dit rien ?
L'homme a reculé, la peur se lit sur son visage.
— Et les gâteaux au beurre de ma femme, vous en souvenez-vous ?
— Vous êtes venus pour vous venger, s'écrie-t-il en reculant encore.
— Oui, répond 421 en entrant dans l'appartement, et je vous demande d'ouvrir ce paquet.
L'homme n'ose pas discuter, en tremblant il défait la ficelle, ôte le papier... Des gâteaux au beurre ! Son regard interroge...
— Les petits gâteaux, vous vous en souvenez, dit 421, vous les aviez mangés tout seul, là-bas, eh bien, ceux-ci, nous allons les manger ensemble ! Jésus m'a tout pardonné et c'est à cause de Lui que moi aussi je vous pardonne.
C'en est trop pour l'ancien chef ! Il s'est effondré sur le canapé et il pleure. 421 s'est assis à côté de lui et lui parle de Jésus qui, alors que tous (les Juifs et les Romains, les grands et les petits) s'étaient ligués pour le clouer sur une croix, s'est écrié : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu'ils font ». Luc 23. 34
Et là, dans ce petit appartement, tous les trois se sont agenouillés et ont demandé au Dieu qui pardonne d'être aussi le Sauveur de l'ancien chef de camp.
C'est Dieu qui pardonne. Quand il pardonne, il fait disparaître et oublie mes péchés : chaque nouvelle faute est alors la première puisque les précédentes sont effacées. Il purifie par le sang de son Fils Jésus (1 Jean 1. 7) : il me rend propre. Il justifie : il me considère comme innocent. (Romains 3. 26) Il me réconcilie : je trouve une relation avec Lui. C'est le départ d'une nouvelle vie par une nouvelle naissance.
Le pardon de Dieu est l'expression la plus naturelle de Son amour. Dieu veut pardonner mais je dois me repentir. La repentance n'est pas un simple regret mais un changement de pensée et de vie. C'est se détourner de son péché et se tourner vers Dieu. (1 Thessaloniciens 1. 9) Même si je sais que mes péchés sont affreux, dès que je les dis à Dieu, il me pardonne aussitôt et il me libère de toute culpabilité : je n'ai qu'à m'appuyer avec confiance sur la déclaration de Dieu : « Il n'y a donc maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont dans le Christ Jésus. » Romains 8. 1
Le Seigneur Jésus a raconté une histoire à ses disciples pour leur enseigner qu'ils devaient pardonner toujours et de tout leur cœur, chacun à son frère. (Matthieu 18. 21-35) Un certain roi fait ses comptes et découvre qu'un de ses serviteurs lui doit 10.000 talents. Il décide de vendre l'homme, sa femme, ses enfants et tout ce qu'il possède pour rentrer dans ses fonds. Mais le serviteur se jette à ses pieds : « Seigneur, dit-il, use de patience envers moi et je te payerai tout. » Plein de pitié, le maître lui remet sa dette. Mais en sortant, cet esclave rencontre un de ses compagnons qui lui doit cent deniers. Il l'étrangle presque en criant : « Paie ce que tu me dois. » Malgré ses supplications, il le jette en prison jusqu'au paiement total. Alors le roi a une réaction sévère mais juste vis-à-vis du serviteur impitoyable : « J'ai eu pitié de toi, n'aurais-tu pas dû avoir pitié toi aussi ? », et il le livre aux bourreaux jusqu'à ce qu'il ait tout payé (c'est-à-dire pour sa vie entière, car qui peut acquitter une telle dette ?).
10.000 talents est une somme astronomique. Un talent valait 6.000 deniers et un denier était le salaire d'une journée de travail. Le serviteur n'aurait pu éponger sa dette de 60 millions de jours de travail. Et qu'est-ce que cent deniers au regard d'une telle dette !
Un jour, chacun devra rendre compte pour lui-même à Dieu. (1 Pierre 4. 5) La dette de l'homme est immense envers Dieu, mais Sa grâce est sans limites. Il a tout effacé. Qui a payé le prix ? C'est Jésus Christ. Comment l'a-t-il fait ? par Sa mort à la croix. Lui a pris ma place de condamné, je suis acquitté « par la foi en son sang ». Romains 3
Si j'ai expérimenté le grand pardon de Dieu, pourrais-je ne pas pardonner la toute petite offense que mon frère m'a faite ?